Zeus’ Family (5) : Aphrodite

Zeus a distribué à chacun des membres éminents de sa famille un rôle très particulier. De quoi dresser quelques portraits choisis…

Elle est unique, sans aucun équivalent. C’est la plus belle, sans la moindre contestation. Elle est née de l’écume marine (aphros en grec signifie « écume »). Et elle a une particularité : sa naissance, violente, violemment sexuée même, va la conduire à explorer, sans limite aucune, tous ses désirs sexuels. Et à entraîner les mortels vers tous les excès.

Rappelez-vous : la faucille de Cronos émasculant son père Ouranos, le sexe jeté à la mer qui féconde l’écume, et la naissance d’Aphrodite née de cette brutale et étrange union. Il y a des mises au monde plus tranquilles, plus discrètes. La belle Aphrodite en verra son destin tout tracé.

La Naissance de Vénus (Aphrodite chez les Romains), Botticelli.

A peine née, Zéphyr, le roi du vent, l’entraîne sur l’île de Chypre où son charme et son élégance se verront épanouies par les Heures, divinités bienveillantes qui personnifient les quatre saisons et qui lui offriront un cadeau magnifique et magique : une somptueuse ceinture d’or qui va la rendre absolument irrésistible.

Lorsqu’elle est présentée aux dieux de l’Olympe, Aphrodite fait l’unanimité : elle est proclamée illico déesse de la beauté et de l’amour. Zeus, devant pareille merveille, décide qu’elle doit prendre mari. Et lui attribue un bien surprenant compagnon : son fils Héphaïstos, « le boiteux », le plus laid de tous les dieux ! Tellement laid qu’à sa naissance sa mère Héra l’avait jeté du haut de l’Olympe ! Et pourtant BB va tomber amoureuse de son Gainsbourg. Enfin… C’est en tous cas ce qu’elle prétend et ce qu’elle tend aussi à prouver en lui donnant quatre enfants. Quatre héritiers qui toutefois, coquine Aphrodite, ne seront pas de lui !

Que d’amants pour assouvir tant de désirs ! Parmi ceux-ci, Harès, dieu de la guerre. Il est grand, il est fort, il est beau comme un légionnaire. Comment lui résister ? Aphrodite n’y songe pas le moins du monde. Ainsi, chaque nuit, pendant que Héphaïstos se tue aux labeurs métalliques, Harès en profite pour s’en aller étreindre sa femme. Longtemps, le boiteux, cocu mais content, ne s’apercevra de rien. Jusqu’au jour où, les amants prolongeant trop longtemps leur illicite besogne, seront surpris à l’aube par Hélios, le dieu soleil. Lequel s’empressera, non sans jalousie (quel morceau cette Aphrodite !), d’en avertir l’infortuné cornu.

Atterré, vert de honte, fou de rage, Héphaïstos va se venger. Il fabrique un filet de chasse en bronze, solide et invisible, l’accroche au montant du lit d’Aphrodite sans qu’elle s’en aperçoive et annonce à tout le monde qu’il part pour un très long voyage. Le soir même, la coquine invite son amant à la rejoindre. Mais Héphaïstos est là ! Et laisse tomber son piège de maille sur les impudiques, désormais prisonniers. Le forgeron ameute alors toute l’Olympe. Et voici tous les dieux et toutes les déesses assistant, non sans moqueries, à l’humiliante scène des deux amants nus et enchaînés. Appolon, Hermès ou Poséidon profitent pleinement de l’occasion pour assouvir leur voyeurisme devant la Bardot à poil. Le dieu de la mer intervient toutefois auprès de Héphaïstos afin que les deux pêcheurs soient libérés de leur filet. L’affreux accepte à la condition qu’ils soient exilés.

Si Harès s’exile en Thrace, Aphrodite elle s’en retourne à Chypre. Mais au préalable, infatigable nymphomane, elle va s’offrir une nuit entière au dieu messager Hermès. De leur union naîtra Hermaphrodite, un être mi-homme mi-femme.

Humiliée par toute l’Olympe, Aphrodite va à son tour se venger. Comment ? En faisant ce qu’elle fait de mieux : tromper, semer les graines de l’infidélité parmi les dieux et les déesses dont chacun et chacune sera tour à tour la victime. Mais la déesse de la beauté sera finalement prise à son propre piège et en verra son destin complètement bouleversé…

En cause : Myrrha, la fille du roi de Chypre, laquelle prétend être si belle qu’il lui paraît inutile de vénérer encore la déesse de l’amour. Piquée au vif, Aphrodite la punit en la rendant raide dingue de son propre père ! Les amants incestueux passeront ainsi douze jours et douze nuits à s’envoyer en l’air sans que le père, envouté par Aphrodite, ne reconnaisse sa fille. Au matin du treizième jour, le roi se rend finalement compte de l’ignominie de cette relation. Il décide de tuer sa fille et de se supprimer. Poursuivie par son père, Myrrha s’enfuit et demande à Zeus de lui venir en aide. Zeus la change en arbre. Mais Myrrha continue de pleurer, et ses larmes deviennent un précieux trésor, la Myrrhe. Plus tard, l’arbre se fendra et Myrrha accouchera d’un splendide garçon, Adonis.

Il est tellement beau, ce gamin, qu’Aphrodite en tombe déjà amoureuse et nourrit le projet d’en faire son amant une fois l’enfant devenu adulte. Pour le soustraire à la convoitise des autres, Aphrodite le confie à Perséphone, la reine des enfers, là où personne ne pourra le lui enlever. Personne ? C’est oublier Perséphone

Des années plus tard, Adonis devenu un magnifique jeune homme, Aphrodite vient réclamer son protégé auprès de la reine des enfers. Perséphone refuse, Aphrodite proteste. Crépage de chignon hystérique. A tel point que Zeus décide d’intervenir. Et il tranche : Adonis vivra avec Perséphone le premier tiers de l’année, Aphrodite le deuxième, et Zeus fera ce qu’il en voudra le troisième. Perséphone pose toutefois une condition : Aphrodite ne pourra pas porter sa ceinture magique, celle qui rend irrésistible, lorsqu’elle sera en présence d’Adonis. Aphrodite accepte… mais, bien sûr, ne respectera pas le pacte.

Adonis, très vite, devient raide dingue d’Aphrodite. Et oublie complètement Perséphone. Laquelle, évidemment, va se venger. Elle s’en va trouver Harès et lui apprend que son incorrigible ex-maîtresse se tape à présent un mortel. Ce qui rend dingue le Rambo. Qui se transforme en énorme sanglier et s’en va percuter mortellement le bel Adonis.

Aphrodite ne se remettra jamais de la perte de son premier et dernier véritable amour. Elle portera le deuil pour l’éternité et Adonis reposera auprès d’elle jusqu’à la fin des temps.

Trop belle, trop désirable, trop convoitée, Aphrodite fait l’unanimité contre elle parmi ses consœurs déesses. Qui toutes la jalousent. Un jour, lors d’un banquet olympien, Iris, déesse de la discorde, fouteuse de merde par excellence, s’y invite sans l’autorisation de Zeus. A peine arrivée, Iris lance sur la table une pomme d’or sur laquelle est inscrit : « A la plus belle ». On comprend très vite ce que cette « pomme de la discorde » va receler d’embrouille… Aphrodite se lève pour s’en emparer. Rejointe immédiatement dans son empressement par deux autres déesses qui lui contestent le statut qu’elle pense pouvoir s’octroyer : Héra, épouse de Zeus, et Athéna, fille de Zeus.

Le roi des dieux doit à nouveau trancher. Mais se garde bien d’assumer la responsabilité du choix. Il choisit un mortel pour élire la plus belle d’entre toutes : Pâris, le fils du roi de Troie. Désemparé, Pâris se révèle incapable de choisir. Héra lui promet alors un royaume à nul autre pareil s’il la choisit, il en deviendrait le plus grand prince du monde grec. Athéna s’interpose alors et formule une autre promesse : devenir invincible, le plus grand guerrier que la terre ait porté. Reste bien sûr Aphrodite. Qui va remporter la mise en promettant à Pâris de lui donner la main de la femme qu’il aime, la très belle Hélène de Sparte, promise à un autre que lui. Le plus grand prince ? Le plus grand héros ? Le plus grand amant ? Pâris n’hésite plus une seule seconde et offre la pomme d’or à Aphrodite. Laquelle offre sa ceinture au jeune homme, cette ceinture qui rend irrésistible, et le conduit à Sparte. Hélène devient éperdument amoureuse de Pâris. Qui l’enlève.

Nul ne sait encore que cet enlèvement, que cette pomme de la discorde, engendra la plus célèbre des guerres de l’Antiquité : la Guerre de Troie. Une guerre au nom de l’amour comme seule était capable d’en déclencher Aphrodite. Qui a pu laisser croire aux mortels pendant ces dix ans d’un conflit mythique qu’ils étaient devenus des demi-dieux…