Canon sur la chair

Voilà un essai ambitieux, complètement à contre-courant de l’époque. Son auteur, professeur de littérature française à l’Université de Columbia, y entend porter une charge héroïque et véhémente contre tous ceux qui aujourd’hui font le procès de la chair : Metoo, végans, technicistes de tous bords occupés à l’entreprise de robotisation du genre humain… C’est gonflé, violent, remarquablement érudit (souvent jusqu’à l’obscurité, Haziza se regardant souvent écrire comme on s’écoute parler). Avec toutefois ce précieux mérite, à mon humble sens : celui de rappeler notre nature animale que les temps dits nouveaux singent à éradiquer.

Nos sens sont bridés, et l’animal que nous sommes, soumis à un dressage dont la fin n’est plus de dompter le désir mais de l’annuler. Le monde confiné dans lequel nous vivons désormais n’est pas seulement triste ou claustrophobique : il est surtout insipide. Pourtant notre nature sauvage se rebiffe et le sang jaillit parfois à nouveau dans la cité pour transformer les pavés en îlots. Le présent livre, en explorant la fadeur contemporaine, raconte donc la guerre du sang et du plastique, de la cruauté et de la mièvrerie.

Le procès de la chair, David Haziza, Grasset, 2022.

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