Apocalypse Now

L’apocalypse, c’est pour dans pas longtemps ! Jamais la littérature n’a cessé de décrire les dérives du monde. A fortiori celui d’aujourd’hui, d’année en année toujours plus effrayant. Avec ses crises à répétitions, économique, politique, terroriste ou sanitaire. Avec son horizon climatique et nucléaire. Avec, en fait, ce sentiment de moins en moins diffus qu’on approche lentement mais sûrement de la fin.

Une foule de romans, des bons, des moins bons, tentent de dresser le portrait de ce monde qui fout le camp.

Parmi ceux-ci, Le monde après nous de l’américain Rumaan Alam et Et la forêt brûlera sous nos pas du suédois Jens Liljestrand. Le premier décrit à Long Island la cohabitation forcée et révélatrice de deux familles (une blanche et une noire) subitement confrontées à une menace ultime. Le second raconte la destinée de quatre personnages face à des incendies d’une ampleur insoupçonnée et dévastatrice en Suède. Et comme souvent, bien davantage que les infos, ça fait froid dans le dos…

Parce que la nature n’a que faire de nous. C’est la chose la plus importante, ce que nous devons tenter de comprendre.

La nature s’en fout.

Elle ne va pas te remercier parce que tu as acheté un véhicule hybride. Elle ne devient pas plus sympa parce que tu as installé un panneau solaire. Elle n’estime aucunement que tu peux te permettre de prendre l’avion pour aller voir ta sœur mourante si tu évites le transport aérien le reste de ta vie. Elle ne te donne pas un peu plus de pluie parce que tu t’es contenté d’avoir deux enfant, un seul, ou aucun. Elle n’absorbe ni plus ni moins de CO2 si tu vas voter. Elle n’épargne pas les récifs de corail, les glaciers et les forêts humides parce que tu persuades tes enfants de goûter à la bolognaise de quorn. Rien de ce que nous faisons aujourd’hui ne peut influer sur ce que nous vivons à l’heure actuelle, c’est la conséquence de décisions qui ont été prises et surtout qui n’ont pas été prises il y a dix, trente ou cinquante ans.

La nature ne négocie pas. On ne peut ni la convaincre, ni l’apaiser, ni la menacer. Nous sommes une catastrophe naturelle qui s’étend depuis dix mille ans, nous sommes la sixième extinction de masse, nous sommes un super-prédateur, une bactérie meurtrière, une espèce invasive, mais pour la nature nous ne sommes qu’une ride sur la surface. Une broutille, un toussotement, un cauchemar dont on se souvient à peine.

Lorsque nous disons que nous sommes en train de « détruire la planète » ou « d’endommager la nature », c’est un mensonge égocentrique. Nous ne détruisons pas la planète. Nous ne détruisons que nos possibilités d’y vivre.

Jens Liljestrand, Et la forêt brûlera sous nos pas, Autrement, 2022.

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